C KOI DONC UN ARTISTE OFFICIEL PAPA ?
C koi donc un artiste officiel ?
BUREN ENTRE CYNISME ET RIDICULE
target=_new>http://www.lemonde.fr/culture/article/2008/07/24/daniel-buren-il-n-y-a-plus-d-artistes-officiels_1076759_3246.html?xtor=RSS-3246
En réaction à l'article de Monde , " Il n'y a plus d'artistes officiels", P.16 Culture, Le Monde, daté du 25 juillet 2008
ÊTRE UN ARTISTE OFFICIEL, C'EST QUELQUE CHOSE QUI SE MERITE ! QU'ON SE LE DISE...
Je lis dans le même journal, six jours plus tard, sous la signature de Jean-Marie Laclavetine, écrivain, sur un sujet tout autre, mais qui pourrait parfaitement dépeindre le milieu de l'art contemporain ses artistes et ses institutions : " Dans une Europe barricadée, la maison France a fermé ses portes et ses fenêtres. La police du langage surveille chacune de nos phrases. Nous vivons dans l'obscurité des vérités communes, des hypocrisies admises, des bienséances cathodiques, des peurs silencieuses, des grandiloquences convenables ". (Nous avons besoin des outrances de Siné; Le Monde daté du vendredi 1er août 2008 p.14))
N'en déplaise à Daniel Buren, qui s'en défend si maladroitement, contre toute évidence, oui, en effet, il n'y a plus, aujourd'hui, que des artistes officiels. Le système de l'art contemporain se charge d'en fabriquer au kilomètre. Daniel Buren en est, malgré ses dénégations pathétiques, le parangon et le phénix, le plus éclatant. Ses affirmations et sa vertu autoproclamée peuvent s'afficher en grosses lettres, ici ou là, dans la presse du soir, rien n'y changera. Ce n'est pas en affirmant et en répétant trois fois de suite une contre vérité notoire, que celle-ci devient soudain, par cette seule obstination, un fait ressortissant des sciences exactes ou une simple vérité.
Les choses doivent être claires au départ. Je ne suis nullement rongé par la jalousie. J'aurai mauvaise grâce à l'être. Pour s'en convaincre, il suffira de faire un tour sur Google; en donnant mon nom et, successivement, celui de Buren. On verra bien qui des deux, en réalité, doit être jaloux de l'autre. Je n'appartiens par ailleurs nullement à la catégorie de ses détracteurs qu'il stigmatise, en les qualifiant de " ceux qui ne comprenaient déjà rien qui d'un seul coup ont trouvé cet argument ". J'ai toujours considéré, dans les années 70, sa démarche de questionnement critique comme un engagement artistique novateur et radical. L'économie des moyens plastiques qu'il a mis en œuvre avec ses petits camarades de BMPT m'a paru une qualité fondamentale de ce travail critique.
La seule question légitime qu'on peut se poser, par contre, à son sujet, c'est celle de savoir si après trois décennies de répétition, sans renouvellement du langage formel et critique, on peut encore se prétendre un créateur, à reproduire le même discours formel et conceptuel, alors que le monde a changé, du tout au tout, autour de nous ? De savoir, si l'on peut décliner, ainsi de façon aussi systématique, un concept, sans doute intéressant à l'origine, mais réduit au fil du temps par le marketing culturel à un logo visuel primaire, ratissant un à un, jusqu'à leur épuisement total, les moindres recoins de l'esthétique décorative.
La question se pose, alors, de savoir s'il s'agit encore bien d'art ? Et s'il s'agit bien d'art, de savoir qui en décide en dernier ressort, du Ministère de la culture, de Christie's ou de la galerie Tartemplon ?
Un point aussi sur lequel je récuse les arguments de Buren, pour botter en touche ceux qui le traitent "d'artiste officiel " c'est de croire pouvoir s'en débarrasser, non sans une pointe de mépris en affirmant sans preuve aucune : " Souvent ces critiques viennent d'artistes qui ne sont jamais invités par les institutions sans jamais se demander, pour commencer s'ils le mérite de l'être ". Diable, je connais justement plus d'une dizaine de ces artistes en France qui mériteraient justement de l'être, et qui ne le sont jamais, uniquement, parce que :
- Primo, ils ne font pas partie des élus du premier cercle de connivence esthético-mondain du système de l'art contemporain, où l'argent-roi du marché fricote étroitement avec le pouvoir administratif culturel et politique
- Deuzio, parce que leur pratique innovante échappe totalement aux fonctionnaires responsables de ses dites invitations, qui préfèrent, sans gloire, ni honneur, s'en remettre, pieds et mains liés, aux choix imposés par le marché. Ce qui dénote pour le moins, chez eux, d'une certaine paresse d'esprit et bien plus grave, encore, d'une ignorance crasse, qu'explique mal, par ailleurs, les compétences requises pour les fonctions dont ils ont en principe la charge (?) Le bazar et l'échec de la " Force de l'art ", la dernière expo de prestige organisée au Grand Palais en témoigne cruellement, sans compter la piètre représentation des artistes français à l'étranger, qui n'est plus un mystère pour personne, depuis que le rapport Quemin a sonné le glas des illusions et des prétentions institutionnelles.
Que Buren doive principalement sa gloire et son statut d'artiste officiel à la " victimisation " qu'il a savamment entretenue, dans l'affaire des colonnes, personne ne saurait le lui reprocher, à moins d'être le dernier des pisse-froid. Quand on sait combien les artistes sont démunis de moyens face aux pouvoirs économiques et politiques qui les manipulent, il est légitime, à l'occasion, qu'ils fassent flèches de tout bois, à condition, bien entendu, de ne jamais devenir, en contrepartie, ni leur alibi, et encore moins leur suppôt.
Mais pour en finir, une bonne fois pour toute, qu'est-ce donc qu'un " artiste officiel " au juste ?
Si un artiste officiel c'est celui qui conforte les pouvoirs en place et met à leur disposition son image symbolique, artistique et publique ?
Si c'est celui qui participe à leurs cérémonies commémoratives en tête de gondole, et celui qui se situe dans le politiquement correct, quel que soit la nature du régime en place ?
Si c'est celui qui a le privilège discrétionnaire des commandes de l'Etat, dont il est un des favoris et le champion toutes catégories, et s'il bénéficie, enfin, d'invitations officielles et de financements avant tous les autres ?
Oui, alors, on peut dire, sans abus sémantique, que cet artiste est un artiste officiel mon fils !
Je ne vois pas pourquoi il faudrait en avoir honte, quand on se nomme Daniel Buren, au lieu d'avoir la fierté de l'assumer, jusqu'au bout des ongles, plutôt que de s'en défendre comme de la peste, alors que ce fait est un fait de notoriété publique !
C'est vrai, par contre, que l'on ne peut pas avoir, à la fois, le beurre et l'argent du beurre. Il y a un moment où il faut savoir choisir et l'assumer entièrement.
Être un artiste officiel, c'est quelque chose, à coup sûr, qui se mérite en fonction de la palette de ses relations institutionnelles, de ses bonnes manières et de la souplesse de son échine.
Être un artiste, critique et libre, libre comme le vent, qui à l'occasion crache dans la soupe, c'est plutôt une tare héréditaire qui se supporte joyeusement toute la vie.
Les uns comme les autres peuvent être tout aussi bien d'excellents artistes !
C'est la postérité qui nous le dira. Mais il suffit de considérer l'histoire de l'art pour savoir déjà de quel côté penche la balance...
Fred Forest
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